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Émile MERCIER

Madame Paulette Mercier et Monsieur Emile Mercier

Emile Mercier est né à Chalon sur Saone en 1910, ses parents sont originaires de Volognat, à 10 km de Nantua. Il  apprend à lire en déchiffrant les comptes rendus de guerre de 1918. Ses convictions patriotiques naissent ainsi. Il effectue ses études de médecine à la faculté de Lyon.

Impossible d’évoquer le docteur sans parler du couple dans la Résistance, comme dans la vie.

Paulette Perrottet est née à Privas en 1911 où son père est avoué, mais sa famille était enracinée depuis des siècles en Provence, issue de ces protestants vaudois descendus des vallées alpines pour subsister et travailler la terre au XIII ème siècle. Tous étaient et sont, des personnages de caractère. Les Perrottet avaient fondé le hameau des Cortasses à Gordes (Vaucluse) à cette époque.

Elle fait des études de pharmacie à la faculté de Lyon. Là, elle rencontre Émile Mercier. Ils se marient en 1935.

Elle s’installe comme pharmacienne à Nantua en 1935. Émile, ses études achevées, la rejoint en 1936. Émile crée un cabinet médical au 30 rue Nationale. (actuelle rue Dr Emile Mercier) Le couple habite au-dessus. Ils ont deux enfants lorsqu’ils entendent à la radio le discours du Maréchal Pétain le 17 juin 1940, ils sont anéantis. Le soir même, ils refusent cette défaite, cette capitulation, ils sont révoltés.

Il convient de “tâter” les esprits, autour d’eux, parmi leurs amis, leurs confrères, leur clientèle, sur cette idée du refus. Des amitiés se créent, d’autres s’éteignent. Rassembler les consciences et essaimer….

Les Sengissen, Jantet, Maissiat, Ravier, Davenas, Grobon … adhèrent.

Le couple Mercier est très anglophile, sentiment exalté  par la victoire de la R.A.F. dans la “Bataille d’Angleterre”. L’Angleterre en mai 41 est seule face à Hitler. Pour envoyer un message clair, le couple appelle leur deuxième fille née le 19 mai 1941, Elisabeth, Reine. Anéantis par la perte du “Hood” coulé par le “Bismark” le 21 mai, le couple fait publier le faire-part de naissance de leur fillle dans l’Abeille du Bugey. C’était une  feuille de chou locale, dont le rédacteur manifestait la plus grande dévotion envers le Maréchal. Ce fut  vrai pied de nez aux Vichissois. Des premiers contacts se nouent avec les bressans du mouvement Combat, et avec Adhémar (J3) du mouvement Franc-Tireur, de Bellegarde.

Émile Mercier (René) est contacté par Richard Brooks (Tony), agent du S.O.E. (Special Operation Executive) qui est à la tête du réseau Pimento Tony lui parle aussi d’un réseau d’évasion, spécifique aux équipages de la R.A.F., dont les avions ont été abattus en France: le réseau Pat O’ Leary. Émile Mercier, maintenant René  adhère à ces deux réseaux. Émile Mercier reste inquiet à propos d’un “mitrailleur de queue” qui séjourne trop longtemps à son gré, chez un cafetier d’Intriat, les Guinard alors qu’il ne parle pas un mot de français. Mais les pilotes sont prioritaires….

La maison familiale à Nantua sert de lieu de culte à la communauté protestante des environs, célébré par le pasteur Liotard de Bellegarde. Les familles Jacquard et Monnet assistent régulièrement au culte, ils gérent une propriété recluse dans la montagne au dessus de La Balme sur Cerdon: le Sappel. Paulette Mercier est en contact avec le pasteur suisse De Pury qui officie à Lyon. Il est engagé  dans l’aide aux enfants juifs au sein de L’O.S.E. (Organisme de Secours aux Enfants) en contact avec la C.I.M.A.D.E.. Paulette Mercier lui fait connaître le Sappel, ce havre de paix et la famille Jacquard. Le pasteur Liotard connait de son coté la famille Fonjallas, installée à la frontière suisse, à Prevessin. Un réseau est ainsi constitué.

Les enfants sont en paix au Sappel, mais la menace grandissant, décision est prise de les “passer” en Suisse. Douze enfants juifs “passent” en Suisse à Prévessin grâce aux Fonjallas. Paulette place des adolescentes juives comme ménagères dans des familles du canton et au-delà.

Témoignage de Mme Paulette Mercier.

Émile Mercier et ses amis adhèrent au mouvement Combat, il est nommé chef de secteur. Dédaignant les affaires militaires, il confie cette mission à Auguste Jantet. Romans Petit (Romans) le charge d’organiser le service de santé des Maquis de l’Ain. Il soigne entre autres les camps de Chougeat, Granges et Cize. Il aimerait tant ce joindre à eux et mener leur vie. Mais il disait ” Je ne peux dévier de ma ligne de conduite. Je fais maintenant de l’action clandestine, mais j’ai commencé la Résistance à visage découvert, je ne peux pas partir, je me sens responsable vis-à-vis de ceux que j’ai entraînés. S’il arrive quelque chose dans cette ville, ce sera la rançon de notre activité, je veux être là à ce moment.” Et il rentrait à la maison, trouvant bien souvent dans sa boîte aux lettres quelques menaces de mort, il secouait alors tranquillement les épaules, souriait….et continuait.

La rafle de Nantua lui est fatale le 14 décembre 1943.

Lors de la rafle du 14 décembre 1943, Emile Mercier est abattu sur la RN 84 peu après Maillat, en direction de Lyon. Il avait 33 ans.

Madame Paulette Mercier, surnommée la “Führerine” par les Allemands, est “arrachée” à sa pharmacie le 12 juillet 1944, alors que les Allemands sont aux portes de la ville, par le procureur Davenas et le sous-préfet Dupoizat. Elle voulait rester à Nantua. La traction fuit vers Bellegarde, alors que le barrage de Trébillet cède. Elle veut rejoindre les blessés évacués des hôpitaux de Nantua et d’Oyonnax. Dupoizat l’emmène à Apremont où elle reste.

Ces blessés sont dans la colonie de vacances des enfants d’Oyonnax, à Apremont. Devant la menace, les allemands étant à Nantua, les blessés son chargés sur un char à boeufs  et guidés par un paysan local vers le bois de la Gotette, au-dessus du hameau. Le Dr Parker, (Parsifal du S.O.E.) estimait pourtant que les blessés ne risquaient rien, puisque “protégés” par la Convention de Genève !!

Ce monde reste caché 10 jours dans ce bois; Paulette Mercier et Germaine Bernardini dont le frère est blessé, les veillent jours et nuits. Le docteur Guttières les visite quotidiennement. Les Allemands trouvent les pansements ensanglantés dans la colonie, furieux, ils la brûlent et cherchent les blessés. Ceux-ci, cachés sous les sapins les entendent distinctement. Heureusement le groupe-franc Werner-Pesce tout proche fait diversion et détoune les Allemands.

La soldatesque partie, ils sont transportés en camion à la Borne au Lion, où au pied du Crêt de Chalam, un hôpital de campagne est établi dans une ferme. Paulette Mercier officie encore comme infirmière auprès des chirurgiens René Guillet et Geoffroy Parker (Parsifal). La toile cirée de la table de cuisine, est lavée à grands seaux d’eau entre chaque opération.

A la mi-septembre, Paulette Mercier retourne à son officine accueillir ses clients. Ayant perdu son mari et sa soeur en 6 mois, elle se réfugie dans les études de médecine qu’elle mène à bien.