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Témoignage de Louis Bertin Fontainebrux

1942

Je suis Bertin Louis, ancien de Combat, appartenant au Groupe Franc de Villeurbanne avec Marcel Bardon, le responsable étant René Laval. Agent de liaison Villeurbanne Lyon, ensuite affecté au Service Social de Combat, mon surnom était Rizet, j’habitais 25 avenue de la Rize à Vaulx-en-Velin.

Je me permets d’écrire ces quelques lignes car j’ai le coeur un peu gros de constater que, lors de nos différentes réunions, ou dans notre presse (journaux), il n’est plus fait allusion aux vrais anciens pour ne pas dire les premiers, ceux qui furent la base de notre mouvement “Combat”.

Malartre que j’ai connu en 1942 alors qu’il était route de Vienne, avec l’ami Vincent, garagiste et pièces détachées. Le garage était la planque d’un dépôt de miel liquide qui était destiné à la biscuiterie Ninot, rue Racine à Villeurbanne, pour la fabrication de biscuits qui étaient la base de nos colis à destination de nos gars emprisonnés par Vichy. St Sulpice la Pointe, St Paul d’Eyjaux en particulier ou remis à un membre de leur famille (ex. Mr Gonnet).

Ce miel, mis en bidons placés sur une remorque tirée par un vélo était amené à la biscuiterie. Conditionnés en boites de 2 kg. les biscuites étaient ensuite transportés à Lyon (cours Morand) où se situait notre Service Social, dans l’arrière boutique de la Grande Parasolerie Lyonnaise.

Les colis confectionnés étaient expédiés par la poste. Destinataires, nom, et lieus étaient réels, mais expéditeurs et adresses, purement imaginaires. Comme il en partait deux à trois par semaine, le bureau de poste n’était jamais le même. Je crois avoir fait tous les bureaux de poste des 3° et 6° arrondissements. Je tiens à saluer les agents des PTT, je n’ai subi ni questions indiscrètes, ni demandes de présentation de papier. Il m’est arrivé, une fois, de refaire un colis dans un bureau pour enlever une pomme de terre. Celui-ci étant légèrement trop lourd et dépassant les normes, l’employé refusait de le prendre. Pressé, et ne voulant pas de discussion, je l’ai normalisé.

Je ne me souviens plus de la date mais nous fûmes obligés de déménager pour nous installer dans un magasin d’antiquités rue Vaubecour (?). Que sont devenues ces dames ?.

Travaillant à Vénissieux chez Berliet, je fus chargé par René Laval de l’introduction et de la vente dans l’usine, au profit de notre service social, de photos du Général De Gaulle et du journal Combat.

Un jour, Laval m’a confié un tube genre pâte dentifrice plein de vaseline mélangé à de la limaille de fer, à charge pour moi, d’en mettre dans les organes des bancs d’essai des moteurs de camions. Résultats très médiocres, car la quantité était insuffisante pour arrêter les essais. Désigné pour le S.T.O., je fus obligé de partir de l’usine et affecté au service social de “Combat”. En plus, distribution de tracts et distribution de messages urgents dans certaines boites aux lettres.

Peinture en grosses lettres blanches sur le bas port du Rhône à hauteur du pont Morand ” Lisez Combat – Franc Tireur – Libération”.

Voici quelques surnoms, noms de famille et région d’origine de certains camarades cités dans ce résumé d’actions.

  • “Biture ” BOULEY André Dôle
  • “Zazou” BACLAY Jean Dôle
  • “Ferlet” SANTINA Serge Dôle
  • “William” ? René Besançon
  • “La Fleur” Bernard
  • “La Chatte” BOUVIER Chaumergy
  • “Kiki” BLONDE Henri Chaumergy
  • “Pierre” Wolokowski Piotr Ordjonikdzé, Caucase Russie.
  • “Bel Ami” OZANON Paul Longwy s/ Doubs
  • “Robinet” RIBOLLET Henri ?
  • “Bernardin” BERNARD Georges Villeurbanne
  • “Proust” SALLIN Pierre Ain ?
  • L’épicier était Monsieur RICHARD de Beaurepaire
  • Le boulanger était Monsieur CHAUTARD de Saillenard
  • Le boucher était Monsieur COLLINET de Saillenard.

1943

Francs Tireurs et Partisans Français

Camp Gambetta

Avertissement : Tous les noms propres cités en premier sont les noms réels, suivis des noms sous lesquels ils furent enregistrés pour l’effectif et ensuite le surnom sous lequel ils furent connus dans la région.
C’est dans la première semaine d’Août 1943 que, venant du camp de Cluny :
André GUIPET ” Honoré Billard” dit Francis, 193579,
Jean BARBIER “Edmond Dutheil” dit Jean,
Louis BERTIN “Georges Bertiller” dit Louis, 193564,
venaient s’installer dans le” bois des Vernes ” sur la commune de Fontainebrux (Jura) à 12 Km de Lons-le-Saunier.

Deux jours plus tard, sept autres camarades dont je n’ai pas toutes les identités réelles, venaient nous rejoindre, arrivant aussi du camp de Cluny. Il s’agissait de Francis Janté, Louis Bernardin, Hector Berlioz, Marcel Proust, Jules Adam, Le Parisien, Lucien.

Un camp “F.T.P.F.” de 10 hommes, rattaché à la région I3 venait ainsi de se constituer, avec pour chef de secteur Paul Buatois “Jules Blanc”. Nous étions très heureux de pouvoir enfin travailler contre les boches, forts des promesses en armes et argent qui nous avaient été faites lors de notre départ de Cluny.

Le campement était constitué d’une tente de 4 places prêtée par Edmond Dutheil et de 3 tentes individuelles, en attendant que nous construisions une sorte de petite baraque de branchage. Le matériel se composait d’une marmite prêtée par Jules Blanc et d’un bidon de 2 litres appartenant à Francis.

Notre armement se réduisait à trois revolvers et une mitraillette. Quelques temps après, nous obtenions deux grenades remises par Jules Blanc.

Pour acheter à manger, nous ne possédions que notre argent personnel qui fut bientôt dépensé. Francis avait heureusement plus d’argent que nous autres, ce qui nous permis de nous nourrir en attendant l’argent promis par la direction du camp de Cluny (2500 F par mois et par homme). Nous n’avons d’ailleurs jamais reçu cet argent.

Nous étions installé dans un bois. Pour l’eau potable, nous allions le chercher dans le puits d’une ferme abandonnée (la ferme Bernard) sur la commune de Saillenard ( S.& L.). Pour la toilette, vite faite, nous avions un petit ruisseau.

Un matin, alors que nous faisions chauffer du chocolat, apporté de Cluny (origine Secours Populaire Français), la fumée dégagée par ce feu, il avait plus dans la nuit, nous fûmes totalement surpris par trois habitants de Fontainebrux, que nous ne connaissions pas. Heureusement pour nous, ces gens étaient de vrais français. Après quelques discussions, l’un parti nous chercher une grosse miche de pain, un autre revint avec des pommes de terre et le troisième nous ramena de l’huile pour graisser et entretenir nos armes.

Par Jules Blanc et certains habitants, nous fîmes connaissance avec le boulanger, le boucher et l’épicier qui acceptèrent de nous ravitailler mais en payant et en fournissant des tickets de ravitaillement. Il nous fallut alors commencer à “faire” les mairies pour les tickets et les postes pour l’argent.

Et notre travail commença.

Guidés par Francis qui connaissait parfaitement la région, en prenant des chemins détournés, commencèrent les déraillements. Trains de charbon, de papier, de ravitaillements, d’explosifs, de permissionnaires boches.

Ainsi le 23 Septembre 1943.

Pour l’anniversaire de Valmy, la région nous a demandé “une action”; comme d’habitude, nous allons “dérailler” et comme toujours, nous opérons par déboulonnage des rails. En France les trains circulent à gauche. Nous les faisons verser à droite de façon à obstruer en même temps l’autre voie pour trois ou quatre jours. Nous opérons à six hommes. Deux aux tire-fond, deux aux éclisses, un surveillant le signal et un surveillant la voie ” gardes voies” ou autres.

Ce jour là, le déboulonnage des tire-fond est terminé sauf un récalcitrant qui refuse de céder. Tant pis. Le feu passe au vert, nous évacuons la voie et nous voyons passer une machine, haut le pied. Nous réalisons qu’une machine ne circule pas seule sur cette voie très fréquentée. C’est pourquoi nous nous remettons avec rage à ce sacré tire-fond car nous nous doutons qu’un important convoi va suivre et enfin ce récalcitrant cède. Vite, nous tournons le rail. Il était temps, un grondement se fait entendre dans le lointain. Nous attendons et le résultat est là. La loco roule un peu puis se plante dans le ballast. Nous voyons tous les wagons en bois s’amonceler dans un amas dantesque car avec le bruit de casse se mêlent des cris et des hurlements.

C’était donc un convoi militaire que nous avions eu. Les copains reprennent les vélos et s’en vont pour retourner au camp. Je reste pour exécuter les ordres qui me demandent de coucher dans une ferme amie, à quelques kilomètres, pour envoyer le sympathisant sur place et savoir exactement le résultat pour notre rapport à la région, comme après chaque action.

Voici le rapport, à vérifier par la suite: deux Généraux, un Lieutenant Colonel, trois capitaines et plus de deux cent soldats payèrent de leur vie leur témérité de circuler en pays conquis. Nous revenions heureux chaque fois qu’il y avait une réussite malgré les trente cinq kilomètres que nous étions obligés de faire en vélo pour aller vers 21 h et revenir au camp vers 4 ou h du matin, avant le lever du jour.

Pourquoi une telle réussite ce jour-là ?. Nous n’étions pas prévenu et pourtant. Le mystère est que ce soir-là, un autre groupe de maquis avait fait sauter le tunnel Passenans dans lequel passe la voie. Le convoi avait été stoppé devant et devant l’impossibilité de faire demi tour, une autre locomotive était montée pour le tirer dans l’autre sens.

Un convoi militaire est toujours composé dans le même ordre. Derrière la loco et son tender, le wagon de matériel puis les wagons des hommes de troupes et, fermant la marche, le wagon de l’état major. Ainsi, lorsque ce convoi s’est trouvé tiré dans l’autre sens par la loco de dépannage, le wagon de l’état major, s’est retrouvé juste derrière la loco. Et quand celle-ci s’est plantée, tous les wagons sont montés sur le wagon de l’état major pour le résultat connu.

Suite à ce déraillement, nous avons eu les honneurs de Radio Londres et Radio Moscou que nous avons eu le plaisir d’entendre chez un ami dont la ferme devait servir, par la suite, d’infirmerie pour notre maquis.

Vers le 23 Septembre, deux camarades partaient en mission en vue de “récupérer” deux bicyclettes dont nous avions grand besoin. A la sortie de Lons, ils furent poursuivis pas des policiers qui leur tirèrent dessus. L’un d’eux, Francis Janté, fut atteint d’une balle de revolver dans la cuisse. Ils réussirent malgré tout à s’enfuir et se réfugièrent dans une maison de village amie de Larnaud où le blessé reçu les premiers soins par le très sympathique et dévoué Docteur Perraudin de Bletterans.

Le 25 Septembre, le nommé “Parisien” venant nous rejoindre pour nous donner des nouvelles de Janté fut tiré par un policier qui gardait la région à la suite de l’opération de la veille. Il fut atteint au gros orteil droit mais il réussit quand même lui aussi à s’enfuir. Tous deux furent ensuite transportés au château de Villevieux transformé en infirmerie par l’A.S. où ils reçurent des soins dévoués des demoiselles Bergerot propriétaires du château.

Le regretté Dr Michel, chirurgien de l’hôpital de Lons s’y rendit pour opérer les deux blessés. Le nommé Parisien subit l’amputation du gros orteil. Ils partirent ensuite à Lyon avec le nommé Lucien qui nous devait une forte somme d’argent.

A la fin de Septembre, trois camarades furent désignés pour aller récupérer des tickets de rationnement dans un petit village de l’Ain. Sur les ordres de Jules Blanc, Bernardin, Proust et Dutheil partirent un soir, en vélo. Au retour, le lendemain matin, Proust et Bernardin qui avaient une mitraillette dans un sac tyrolien furent arrêtés par deux gendarmes de la brigade de Beaurepaire (S.& L.).Ces derniers ne voulant pas laisser passer nos camarades, Bernardin sortit un pistolet et tira en l’air pour intimider les gendarmes.

Mais ces fidèles représentants de l’ordre de Vichy ne voulurent pas lâcher prise. L’arme de Bernardin s’étant enrayée, nos camarades durent se laisser emmener comme des malfaiteurs par ces bons français au service des boches. Ils furent emmenés à la prison de Beaurepaire puis de là, transférés à Bourg et enfin, jugés à Lyon où, sur la déposition d’un gendarme venu spécialement pour les charger, ils furent condamnés aux travaux forcés :perpétuité pour Bernardin et douze ans pour Proust.

Nous savons aujourd’hui que ces deux camarades, après être passés par St Sulpice la Pointe, transférés à la prison d’Eysses partirent en captivité en Allemagne Déportés à Dachau, ils sont revenus tous les deux de l’enfer. Dutheil, qui avait eu son vélo abîmé et n’avait pas pu suivre ses camarades échappa de justesse à leur sort.

Le camp se trouvait alors réduit à cinq hommes puis quelques jours plus tard à quatre, Dutheil ayant attrapé la gale dut cesser son activité pour se faire soigner à Lons le Saunier chez ses parents. Nous déménageâmes pour nous installer dans une baraque de pré d’embouche appartenant à un boucher de nos amis du village de Saillenard (S.& L.).

Francis prit alors le commandement.

Le 13 Octobre au matin, allant chercher le lait pour le déjeuner dans la ferme amie tenue par Mme Marie José Gauthier, Georges Bertillet, plus connu dans la région sous le nom de Louis, avait mis sa mitraillette sur l’épaule. Mal accrochée, celle-ci tomba sur la crosse. Un chargeur étant engagée, la culasse mobile manoeuvra sous le choc et le coup parti, atteignant le camarade à l’avant bras gauche. La balle entra au coude et sortit à la base du poignet. Il fut immédiatement conduit dans une maison amie, tenue par le sympathique charpentier de Fontainebrux Mr Broux qui mit tout de suite une chambre à sa disposition. Le Docteur Perraudin, déjà cité, prévenu par ces gens, vint rapidement constater l’état de la blessure et après avoir fait un pansement, dit qu’une intervention chirurgicale était nécessaire. Il partit de suite prévenir son ami le Docteur Michel qui, sitôt revenu d’un voyage, effectué à Lyon, vint à 2 h du matin avec son nécessaire opératoire. Il ouvrit le bras, après avoir passé une tringle dans le trajet de la balle pour nettoyer et constater qu’aucun nerf n’avait été touché. Mr Broux, sa femme et le Docteur Perraudin maintenaient le blessé sur le lit pendant le travail sans anesthésie. L’opération terminée, ce dévoué serviteur de la Résistance retourna à Lons le Saunier sans avoir voulu accepter le moindre rémunération pour ce dangereux travail. Plus encore, après les remerciements, il déclara,
— Je te considère comme un soldat et j’ai fait mon devoir.

Sur le camp réduit à trois, commençait à poindre le découragement quand vint l’ordre de rejoindre un groupe en formation à Courbouzon (Jura). Francis prit donc un rendez-vous avec le chef de ce groupe et plusieurs jours de suite parti reconnaître divers emplacements dans la montagne. Mais le manque d’eau n’ayant pas permis d’en trouver un, les deux chefs décidèrent que le camp serait reformé sur l’emplacement de notre première installation.

Ainsi, les premiers jours de Novembre 43, le bois de Vernes vit arriver ses nouveaux occupants venus à pied. Ces gars-là venaient de la région de Dôle.

Des baraques furent construites: une cuisine faisait office de salle à manger et une chambre pour loger les vingt hommes que nous étions maintenant et qui devinrent très vite une trentaine à la suite de nouveaux arrivages. Une troisième baraque fut vite nécessaire pour abriter tout ce monde.

Elles étaient faites de branchages tressés pour les murs et recouvertes de bâches enlevées de nuit chez des collaborateurs notoires. Le fourneau de la cuisine nous fut donné par Mr Marie José Gauthier qui nous a rendu beaucoup de services. Les lits étaient des sortes de bat-flanc recouverts de fougères et d’une épaisse couche de paille.

Le 20 Novembre, Jules Blanc nous amena un soldat de la vaillante Armée Rouge fait prisonnier et qui, pour la deuxième fois, s’évadait des boches. De son vrai nom Piotr Wolokowski, il fut appelé Pierre Duchen.

Sur les conseils de notre chef d’alors, Latour, il fut décidé que le camp prendrait le nom de Gambetta. C’est à cette époque que nos camarades Marius et Louis firent la chanson du camp Gambetta sur l’air de “La Jeune Garde” qui est vendue et même chantée un peu partout.

Le 18 Novembre, notre camarade Jean Barclay dit “Zazou” nettoyait son revolver, ayant enlevé le chargeur. Mais une balle était restée engagée dans le canon. Et prenant le revolver le canon tourné vers lui, par malchance le coup partit, la balle lui pénétrant le ventre.

Aussitôt averti, le Docteur Perraudin transporta le blessé à l’hôpital de Lons où le chirurgien Michel l’opéra et, malgré pas mal de dégâts, lui sauva la vie.

Le 5 Décembre, les hommes envoyés au ravitaillement revinrent avec des nouvelles alarmantes. 900 boches étaient soi-disant arrivés à Louhans en vue de nous attaquer. Nouvelles d’ailleurs sans aucun fondement comme nous pûmes le constater par la suite; mais ces propos rapportés aux hommes provoquèrent une certaine perturbation. Les uns voulaient partir de suite sans but précis et les autres, une quinzaine, se rangeant autour du chef, décidèrent de ne pas déménager si vite, mais chercher un autre “coin” dans le bois et attendre les événements.

Les paniquards ne voulurent pas entendre raison et partirent quand même, emmenant avec eux le ravitaillement, la camionnette du camp et la plupart des armes. Ils étaient commandés par un certain Meunier. La Direction de la Région fut prévenue de suite. Par sécurité, nous déménageâmes sur un autre emplacement et nous avons attendu les boches imaginaires qui ne vinrent pas.

Le 14 Décembre, un camarade affecté au ravitaillement – le dénommé Ferlet- dût se rendre avec un copain au village de Beaurepaire où les gendarmes casernés avaient déjà sévit contre nous. Les va-et-vient à la sortie de l’épicerie de ces jeunes avaient attiré l’attention du zélé Brigadier. Aussi ce jour, profitant de la présence du Lieutenant Giguet, commandant le district de Louhans, il s’approcha de Ferlet qui, ses commissions finies, les attachaient sur son vélo, et mettant le revolver au poing; lui intima l’ordre de le suivre pour se rendre à la gendarmerie. Son camarade qui était allé faire des courses plus loin assista à la scène et enfourchant son vélo, vint nous prévenir.

Nous nous préparions déjà à partir pour aller délivrer notre camarade quand survint Jules Blanc qui, lui aussi, avait été témoin de cet acte de répression. Il prit aussitôt la direction de l’opération et cinq d’entre-nous, juste ce qu’il y avait de mitraillettes pour armer les hommes, partirent, gonflés de rage et décidés de délivrer, envers et contre tous leur camarade injustement arrêté.

L’attaque contre la gendarmerie fut osée, mais menée de main de maître. La voiture du Lieutenant qui se trouvait devant la gendarmerie fut immédiatement mise hors de service grâce à un feu concentré de mitraillettes. Aux premières rafales, les gendarmes courageux, se réfugièrent au premier étage et se cachèrent.

Malgré les demandes de relaxation de notre ami, Jules Blanc ces braves serviteurs au service de la Kollaboration faisaient la sourde oreille et il fallut une grenade lancée devant la porte tandis que deux hommes passaient dans la cour de la gendarmerie et arrosaient de rafales les fenêtres des cuisines de la brigade qui semèrent la terreur parmi les femmes qui hurlèrent “— Lâchez le gosse !”.

La population du village était derrière nous dans la grande rue et nous criait de tous les tuer.

Enfin notre camarade fut relâché, il était un peu pâle et nous avoua avoir perdu tout espoir de nous revoir si nous étions arrivés cinq minutes plus tard, le Lieutenant se disposant à l’emmener pour interrogatoire plus complet. Nous sommes ensuite rentrés au camp très satisfaits de notre réussite, mais les mains pas vides car la perception qui se trouvait face à la gendarmerie nous dédommagea de notre sortie.

Le lendemain nous avons beaucoup ri en lisant dans le journal local prêté par un ami que ” 10 terroristes ” avaient attaqué la gendarmerie de Beaurepaire et qu’après avoir neutralisé la garnison, ils avaient délivrés leur camarade.

Le 17 Décembre au soir, un gendarme de la brigade de Bletterans (Jura) qui faisait fonction d’agent de renseignement Joseph Scheibel, alsacien d’origine vint nous avertir que des G.M.R. allaient venir de Lyon pour nous donner la chasse. Immédiatement, ayant fait nos sacs et ayant caché le matériel que nous ne pouvions emporter dans un vieux moulin en ruine, nous partions à pied “prendre” un car qui faisait le trajet entre Lons et Chaussin. A 23 h 30, nous arrêtions le car à la sortie du village de Relans, un peu émus, les boches pouvant se trouver à l’intérieur. Heureusement, il n’y en avait pas mais quel émoi parmi les voyageurs voyant monter tous ces gars. Nous avons alors demandé au chauffeur de nous arrêter au lieu-dit “la Borne” Descendus à ce point, nous avons attendu un instant et nous sommes retournés en arrière afin de coucher à Chaumergy où nous attendait un camarade parti le matin même en vélo pour prévenir un ami à avoir à nous préparer le coucher.

Le lendemain à 5 h, le matin, nous sommes repartis après avoir bu un café bien arrosé et nous sommes allé dans notre lieu de repli qui était le bois d’Amont au lieu-dit “La Crostat”. Bien des habitants de Chaumergy ignorent encore à l’heure actuelle où nous avons couché et passé cette nuit plutôt mouvementée.

Le 19 Décembre, notre ancien campement était en effet attaqué par une soixantaine de G.M.R. qui en furent pour leur déplacement et les quelques rafales de mitraillettes qu’ils tirèrent dans les baraques vides.

Le 21, deux camarades partirent au village de Saillenard en vue de trouver un homme possédant une voiture automobile et qui voulut bien transporter tout le matériel nécessaire à notre vie dans les bois (bâches, fourneaux….. etc.) que nous avions laissé dans un moulin brûlé. Pendant ce temps, les camarades restés sur place commencèrent une baraque qui fut baptisée “Villa Gambetta” et notre vie recommença.

Les collabos et les trafiquants du marché noir reçurent notre visite (prélèvements en nature). Je ne mentionne pas les opérations contre les postes ou les perceptions quand la caisse était vide, non plus les bureaux de tabac qui nous virent venir chercher le tabac nécessaire au moral des troupes.

De nombreux jeunes de Dôle (Jura) vinrent vers nous, envoyés par le regretté Maurice Pagnon. Une deuxième baraque fut encore utile pour abriter les quarante gars du camp.

1944

Le 28 Janvier, une voiture servant au ravitaillement était envoyée avec quatre camarades au village de Au retour, à la sortie du village de Sellières, alors que la voiture roulait à une allure rapide, un pneu avant éclata et la voiture s’en fut s’écraser contre un platane bordant la route. Une voiture de passage prit les quatre occupants plus ou moins blessés et les ramena au camp. Après avoir été examinés par la Docteur Perraudin, l’un d’eux, le jeune William René avait le bassin fracturé, son transfert à l’hôpital était nécessaire pour y être opéré.

L’ambulance de l’hôpital de Lons vint le chercher à la fromagerie de “Le Villey” où nous l’avions transporté et il fut opéré de suite par le Docteur Michel. Les autres camarades n’avaient pas été gravement blessés mais avaient de multiples contusions, ce qui nécessita plusieurs jours de repos. Robinet et Pierre.
C’est ici que l’on fit connaissance du secrétaire de mairie de Commenailles (Jura) Mr Vichot. Il nous remis tous les tickets de rationnement de sa commune et nous a même remis cinq fusils Mauser avec munitions, ce qui nous permis d’armer un peu mieux notre groupe.

(Avant le débarquement, se sentant menacé, il prit à son tour le maquis et fonda un groupe qui prit le nom de “Groupe Hervey” et qui fut armé par nous à la suite de notre parachutage.)

Un jour, une vingtaine de camarades décidèrent de partir pour organiser un camp tout près de Dôle, dans la forêt de Serre. Francis leur permit de s’en aller.

Peu après, nous apprîmes que le groupe de jeunes qui nous avait lâché au mois de Décembre avait été attaqué sur la route par les boches alors qu’ils avaient reçu l’ordre de nous rejoindre et qu’il y avait eu de nombreux tués.

Quelques jours plus tard, nous vint la nouvelle de la mort de Maurice Pagnon lâchement assassiné à la suite d’une dénonciation. Il fut bientôt vengé.

Nous fimes encore deux ou trois déraillements.

Le 29 Février, une alerte nous obligeait à lever le camp encore une fois. Nous nous sommes installé alors dans le bois de Larnaud, coupés de toutes liaisons, ne sortant que pour le ravitaillement. Une baraque à moitié enterrée nous servait de logement, pour la quinzaine que nous étions devenus. Une vie monotone commença.

C’est alors qu’un homme entra dans notre vie de maquisard, ‘Le Grand Père”, de son vrai nom Alfred Gross, Lieutenant Colonel au réseau Buchmaster, nom prestigieux s’il en fut, de la Résistance Régionale

Ayant appris le travail accompli par notre groupe et nous voyant si pauvrement armés, il nous fit avoir un parachutages d’armes et de munitions de trois tonnes le 16 Mai.

Une fois tous les hommes bien armés, il nous restait beaucoup de matériel (explosifs etc.) Au lieu de déposer ce supplément dans un quelconque dépôt comme le firent certains groupes de résistance et qui, tous, tombèrent entre les mains des boches ou de la milice, il fut décidé d’armer d’abord les Résistants sédentaires des alentours, puis d’armer d’autres groupes amis qui, comme nous, avaient besoin d’armes.

Dans ce parachutage il y avait aussi des postes récepteurs personnels et un poste émetteur. Ce dernier fut remis au Grand Père. Les petits récepteurs à pile nous rendirent de grands service, en particulier pour le débarquement du 6 Juin.

Le (…) juin, la brigade de gendarmerie de Bletterans recevant l’ordre de rejoindre Lons le Saunier, nous prévient et nous demande de faire une action de force contre la gendarmerie, de désarmer les gendarmes et de les enlever pour sauver la face.. L’opération réussit bien et les gendarmes rejoignirent différents groupes de résistance de leur choix..

Sitôt le débarquement effectué, les résistant sédentaires de Chaumergy nous rejoignirent et construisirent une baraque pour se loger. Nous réquisitionnons quelques voitures et deux camions pour se déplacer au cours des opérations auxquelles nous sommes appelés à participer.

Le 10 juin, Louhans nous prévient à son tour qu’il faut aller chercher les gendarmes les G.M.R., les gardes mobiles et la police de cette ville. L’opération réussit encore pleinement et ce fut une journée inoubliable que celle de notre première occupation d’une ville dans une France sous la domination des boches.

Toute cette police prit le maquis et forma le P.C. de la Résistance dans le secteur Louhannais auquel nous fûmes désormais rattachés en tant que F.F.I.. Le chef était le lieutenant de gendarmerie Giguet.

Le 25 juin, nous fumes appelés pour assurer la protection d’un parachutage monstre dans la région de Lays sur le Doubs. A 9 h du matin, trente six avions américains, anglais et français, apparaissaient par petites vagues successives et lâchaient leur chargement , à la plus grande joie de la population de le petite ville de Pierre en Bresse que nous occupions depuis la première heure et qui ne savait que penser de notre présence dans cette ville un dimanche matin. Car le groupe étant le mieux armé, nous avions occupé la poste, interrompant toutes les communications extérieures et barrions toutes les routes d’accès à la ville, empêchant toutes les personnes de sortir. Mais on pouvait entrer.

Plus de 400 parachutes descendirent ainsi plus de 80 tonnes de matériel de guerre. Parachutage émouvant parce que tricolore.

La totalité de ce parachutage fut transporté dans la grande foret de Pourlans où eut lieu la répartition entre tous les groupes présents. Il nous fut alloué 6 tonnes pour notre groupe.

Avec toutes ces armes, nous pûmes alors appeler des groupes de sédentaires qui voulaient prendre le maquis. Tel fut le cas pour Longwy sur le Doubs et St Germain du Bois (S; & L.) qui nous en envoya une quinzaine par l’intermédiaire du réputé Père Louis. D’autres camarades vinrent encore de différentes direction.

Nous atteignîmes ainsi le chiffre de 80 hommes parfaitement armés qui fut appelé Compagnie Francis. Quatre groupes furent crées plus le groupe de commandement. Quatre baraques durent être construites et en plus, une sorte de grand réfectoire. Pour nos déplacements, rapides nous récupérames 8 voitures légères presque toutes des tractions avant et deux camions Berliet de 5,5 T et 7, 5 T, plus deux motos.

Tout cela toujours dans les bois de Larnaud.

Le 29 Juin, un ordre du P.C. de Louhans nous demande de venir en renfort à Mervans (S. & L.), un groupe de maquis de ce secteur étant attaqué par d’importantes forces allemandes. Une moto, deux voitures légères et un camion emmenèrent 3 groupes sur le lieu du rassemblement fixé. L’opération semble bien marcher et nous sommes envoyés du coté de la gare de St Germain du Bois.Devrouze où des boches se sont réfugiés et résistent. Devant l’encerclement qui se précise autour d’eux, ils réussissent à s’échapper après un échange de rafales de F.M. Nous partons ensuite garder l’important carrefour de routes à Quain (?)

Quelques minutes après avoir pris position et alors que nous pensions manger un peu, 3 voitures allemandes arrivent de la direction de Châlons. Quelques rafales de F.M. arrêtent ces voitures et tuent sans aucun doute quelques uns de leurs occupants car nous ne voyons descendre qu’un boche de la première voiture. Les autres se réfugièrent dans les champs de blé d’alentour.

Nous nous déployons en peu en tirailleurs et nous surveillons attentivement autour de nous.

Un homme du groupe Bazooka (Lafleur) arrive vers nous saignant du poignet gauche. Il a reçu la décharge de la fusée d’une torpille alors qu’il tirait sur les voitures. Un pansement sommaire “américain” et le mal est réparé quand arrive une liaison du P.C. nous donnant l’ordre de rejoindre d’urgence Mervans, les boches amenant du renfort et ainsi menaçant de nous encercler. Nous rejoignons notre lieu de rassemblement et l’ordre de départ est donné au moment où les boches commencent à nous tirer sur la place avec une mitrailleuse.

Nous nous apercevons alors qu’un des nôtres est manquant ( Bel Ami), un jeune de Longwy sur le Doubs.

Les boches font alors brûler quelques fermes du carrefour et le café de la gare de St Germain Devrouze.

Il pleut et , de nuit, nous rejoignons notre camp par des chemins détournés emmenant avec nous tous le P.C. du district de Louhans qui trouvèrent refuge et abri dans certaines maisons et granges de la commune de Fontainebrux.

Le 11 Juillet, un ordre du P.C. nous demande de nous rendre, avec le plus d’hommes possible, du ravitaillement pour plusieurs jours et les moyens de transport à notre disposition, au lieu-dit Le Miroir” à 20 H.A 18 H nous partons, en ne laissant au camp que le personnel indispensable à la garde. Nous arrivons à l’heure fixée et nous attendons les ordres.

D’après les renseignements recueillis, nous devons aller prêter main forte aux maquis du Haut Jura. Nous passons la nuit dans les bois, sur place en attendant toujours les ordres. Enfin le lendemain matin, le départ est donné mais nous devons laisser les camions et partir à pied, juste une voiture légère peut suivre avec du ravitaillement.

Nous passons par Cuiseaux où la population n’est pas enthousiaste de nous voir ainsi à pied et armés car les boches passent souvent et les gens ont peur qu’une rencontre ai lieu dans le pays. Après une marche très pénible, presque sans haltes, nous arrivons au village de Viriat sans incidents. Les groupes sont répartis dans les fermes pour la nuit et un service de garde est mis sur pied.

Le lendemain, jeudi 13 Juillet, nous apprenons que les maquis de la région sont tranquilles et qu’ils ne bougent pas. Nous ne comprenons alors pas pourquoi on nous a envoyé ici. Les gardes mobiles, avec le Capitaine Tom sont avec nous et rouspètent aussi, surtout que le ravitaillement est resté au miroir.

D’accord avec Francis et moi, le Capitaine Tom décident d’aller trouver le Lieutenant Giguet (Condé) qui commande l’expédition pour lui demander ce qu’il compte faire puisque nous perdons notre temps ici. Le lieutenant leur dit de voir si il y a des volontaires pour partir avec lui jusqu’à Thoirette (Ain) à pied.

A cette réponse, Francis et Tom décidèrent d’aller chercher les camions pour ramener les hommes dans leurs camps respectifs. A 15h une voiture légère du groupe Francis (6 hommes) et une Renault à gazo du groupe Tom sont envoyés au Miroir. Nous passons par Ballanod et ensuite par des chemins détournés pour éviter Cuiseaux qui vient de recevoir la visite des boches et dont la villa de Morey, en flammes, nous prouve qu’il y a dut avoir un accrochage. Nous passons d’abord vers les camions des gardes et nous nous dirigeons ensuite vers les nôtres.

En débouchant sur la route Cuiseaux-Louhans, à 1 kilomètre du Miroir, un camarade dans la voiture, se retournant, voit par la glace arrière, entre les jambes du jeune qui est au F.M. sur le toit de la voiture, un camion qui nous suit et dont les occupants font de grands signes on ne peut , de loin, voir si ce sont des nôtres ou des boches .

Aussi, accélérateur à fond (130), nous disparaissons et, prenant un virage à faire éclater les pneus, nous entrons dans la desserte du bois où sont garés nos camions. Je descends avec un camarade à la lisière pendant que les autres continuent et vont faire mettre les camions en marche par les chauffeurs restés en place avec deux gars de garde. Le camion passe sans que je puisse voir les hommes massés dessus, une quarantaine environ. je m’avance sur la route pour mieux voir quand j’entends un bruit de moteur derrière moi. Je rentre vite dans la desserte et me cache dans un fourré juste à temps pour voir déboucher sur la route une voiture légère, un camion encore chargé d’hommes une ambulance et 3 autres voitures. Cette fois, pas d’erreur, ce sont des boches mais je retourne sur la route pour voir où ils vont. Ils s’arrêtent à quelques centaines de mètres, vers un moulin.

Je retourne en vitesse vers mes camarades qui viennent d’allumer les gazos et dont les ventilateurs font beaucoup de bruit. Je les fais arrêter et nous nous plaçons en position d’attente car nous craignons d’être repérés. Mais, comme après deux heures d’attente, rien ne vient, nous allons aux renseignements.

Et nous apprenons que les boches sont venus pour piller le moulin. Nous restons tout de même sur nos gardes et attendons que les pillards repassent. Quelques instants plus tard, des bruits de moteur nous annoncent qu’ils s’en vont. Nous attendons encore un peu et enfin nous partons avec une petite angoisse rejoindre les gardes qui ne savaient que penser de notre retard, ne sachant pas ce qui s’était passé.

A la suite de notre récit et en accord avec eux, nous décidons d’attendre la nuit pour partir et, vers 22h, notre caravane s’ébranle par des chemins de bois. Au bout d’un instant, les boches qui sont sur notre gauche à Cuiseaux, demandent des renforts en envoyant des fusées rouges. Un groupe de maquis a dut les attaquer ou est-ce le bruit de nos 8 camions et 3 voitures légères qui les met en alerte?.

Quelques minutes plus tard, 4 fusées rouges montent dans le ciel sur notre droite dans la direction de St Amour et nous entendons de vives fusillades. Et ces camions qui font un bruit infernal en se traînant à 5km à l’heure . Nous sommes au total une quinzaine d’hommes pour 11 véhicules à protéger. Nous passons des passages à niveau tous fermés et cadenassés par ordre des boches et que nous sommes obligés de faire ouvrir par les gardiens sous la menace des armes.

En débouchant sur la route Cuiseaux-St Amour, nous nous regroupons et nous nous apercevons qu’une voiture légère ne nous suit plus et comme il faut nous dépêcher, nous décidons de continuer. Nous passons par Balanod et nous enfin quand nous prenons la route en lacets qui monte à Viriat.

Le 14 à 5h du matin, nous arrivons enfin à Morval où les gardes et le groupe Francis ont été envoyés en cantonnement Nous passons la journée de notre Fête Nationale dans ce pays où le ravitaillement manque totalement mais il y a beaucoup de cerisiers qui apaisent un peu notre appétit et en reconnaissance, nous baptiserons ce pays “Marfal – les – cerises” . Pendant que nous étions dans ce village, on nous envoya sur une crête de montagne pour surveiller la route qui passait dans la vallée entre St Julien et Grigny. Ce fut une garde de tout repos pas même un vélo ne passa.

Le 15 Juillet, nous apprenons que des péniches de marchandises à destination de l’Allemagne sont bloquées sur le Doubs par la suite de sabotages des écluses à Verdun sur le Doubs. Nous décidons d’aller voir s’il y a moyen de récupérer quelque chose. Une voiture légère et un camion sont désignés pour emmener un groupe. L’opération s’avère délicate car il faut emprunter les grandes routes, ce qui représente environ 45 km fréquentés aussi par les boches.

Nous partons à 5 h de matin. Nous arrivons sans encombres et, en effet, nous voyons une dizaine de péniches dont trois contiennent du vin en vrac et en tonneaux et une autre chargée de 250 tonnes de sucre. Nous chargeons le camion de fûts de vin( Morgon, Villié ) pour la consommation du camp et nous décidons de revenir le lendemain avec d’autres camions pour enlever du sucre pour la population civile ainsi que du vin.

Nous rentrons à 15h . Le 23, nous repartons avec 3 camions à 5h du matin et nous ramenons encore vin et sucre. Le 24, nouveau convoi de 5 camions et nous récupérons encore du vin en vrac dans des camions citernes et du sucre en vrac aussi que nous distribuons à la population à sa plus grande joie qui a enfin du vin pour les batteuses et du sucre pour faire les confitures. Le tout au profit de la caisse du District de Louhans. Le vin en vrac était entreposé dans des cuves chez le marchand de vin de Saillenard et le sucre à l’épicerie.

Le 6 Août, Francis, Louis, Biture chauffeur, Kiki et la Chatte partirent en mission avec une voiture légère sur les routes des alentours du camp. Dans l’après-midi, alors que nous roulions à environ 80 km/h, le pneu de la roue droite avant éclata et le chauffeur n’étant plus maître de sa direction, la voiture alla s’écraser contre un tas de pierre en bordure de route. Biture sortit le premier de la voiture et alla se coucher sur l’herbe dans un champ à proximité ainsi que Francis. Le 1er était le plus gravement atteint Il avait la clavicule droite de déboîtée, une côte cassée, un plaie à la jambe gauche et des contusions multiples. Le 2 ° avait une entorse au pied droit une plaie à la jambe droite et des contusions sur tout le corps. Kiki avait la lèvre inférieure fendue suite au choc avec la barre du siège avant, la Chatte des blessures superficielles et Louis, une plaie au cuir chevelu occasionnée par le plafonnier.

Un laitier de passage ramena Biture le 1er au camp avec Louis qui retourna avec une autre voiture légère sur les lieux de l’accident afin de ramener les autres blessés. La voiture fut enlevée de la route et mises dans un champ en attendant que l’on vienne la chercher le lendemain, elle était inutilisable.

Biture fut transporté dans la ferme Broux, notre infirmerie où le Dr Perrodin vint lui remettre la clavicule en place et lui banda la poitrine avec une chambre à air de vélo pour réduire la fracture de la côte. Kiki fut ramené dans une ferme toujours à Fontainebrux au lieu-dit “Les Friots” où le toub qui était caché et soigné chez Broux vint lui recoudre la lèvre avec du fil et une aiguille ordinaire et désinfecta la plaie avec de la gnôle.

Ici s’arrêtent mes notes. C’est la Libération.

  … deuxième document …

Les pages précédentes relataient mes actions notées dans différents carnets ou notes manuscrites. Ces notes écrites à l’époque, le soir, et en temps libres sur des feuilles parfois mouillées de pluie, avec des crayons à papiers pas toujours en état, étaient rédigées aux retours d’opération et aussitôt cachées.

Plus tard, des souvenirs, des faits précis ont resurgis de ma mémoire.

J’écris dans un grand cahier d’écolier.

Au fur et à mesure, petit à petit, me reviennent en mémoire d’autres opérations, car je n’ai pas noté dans ces souvenirs les différentes et nombreuses actions de notre Groupe. Les dates ne peuvent êtres qu’approximatifs.

Ainsi, tous les bureaux de tabac, toutes les perceptions, les mairies qui reçurent notre visite pour récupérer, tabac, argent, tickets de rationnement dont nous avions besoin et pour la région I3 qui nous le demandait, ont parfois réagis mais toujours acceptés dans le plus grand silence.

En 1943, fin d’année je crois, Nous avons pris en charge Mme Waldeck-Rochet et ses 3 enfants. Nous avons fournis ravitaillement en nature, tickets, argent, et nous changions de « planque » dans des fermes amies de la région chaque fois que ça sentait un peu le « roussi ». Tout ceci ce faisait la nuit et à vélo avec des valises. La fille Liliane 7 ans environ assise en travers sur le cadre trouvait malgré tout le voyage amusant. Elle se disait :’’ ma petite sœur’’.

Il fallait aider et protéger cette famille. Recherché par la Police de Vichy et les Gendarmeries, pour cause de Communisme ; le mari : Waldeck étant à Londres avec De Gaulle, parlait tous les Vendredi soir à la radio de Londres « Les Français parlent aux Français, Paysans de France ». Nous n’étions pas seuls.

L’Hébergement, les soins, la nourriture, argent et tickets fournis à la Maison Broux pour soigner « le Toub.. », de sont vrai nom ( ???). Je crois échappé de la Gestapo de Lyon avec la mâchoire brisée, alimenté de bouillies à la petite cuillère. Soigné clandestinement par le formidable Dr Jean Perrodin.

Ce personnage devenu ensuite Chef de Service à la Sécurité Sociale. N’a pas eu ensuite, la reconnaissance du ventre.

Lors de la visite fin 1943 des responsables pour le Jura de l’A-S et de l’I-S. Alors que notre groupe réduit était cantonné dans les bois au lieu dit « Les Friots ». Ils nous promettaient 2 Francs par jour et par homme si nous interrompions nos activités.

(Pourquoi, quel motif ? ) . Nous refusons en bloc !

Le voyage à Lyon, aller et retour par le train de Marius et Biture, qui nous ont ramenés 5 Fusils de guerre simplement enveloppé dans du papier d’emballage dénote de notre culot.

Une mission à Lyon

Nous sommes le 23 Juin 1943. Envoyé par le Chef de réseau ( Grand-Père) :Alfred Gross . Pour origine le responsable des Opérations des Agents Britannique (le Buck) : Maurice Buckmaster.

Il me faut voir, et informer les responsables de la Résistance de Lyon (futur MUR). Afin de confirmer notre accord pour un Mouvement Unifié de Résistance. Aucun nom, aucun papier. Les informations sur les lieux, et modes de contacts me seront fournies en cours de voyage. ???.

J’avais rendez vous à 11h devant le cinéma ‘’Le Chanteclair’’ à La Croix Rousse. Ces indications m’avaient été données par un agent de liaison en gare de Bourg. Ce matin à 11h : Personne, Rien.

Les consignes étaient simples. En cas de rendez-vous manqué, un autre lieu de rencontre aurait lieu sous le Péristyle du Grand théâtre l’après-midi. Je vais à ce lieu de repêchage et j’attends.

A nouveau, personne, Rien.

Les consignes étaient de rentrer au plus tôt sans chercher un contact.

Je reprends le train pour Lons. Les contrôles sont serrés à l’arrivée à Lons. Puis dans le car de Lons-Chaussin, puis Villevieux., enfin Bletterans ou j’avais garé mon vélo. Je crois avoir battu tous les records de vitesse pour arriver au camp.
Le lendemain ……….

Nous écoutons la Radio chez Mr Broux. Nous apprenons que la Résistance de Lyon a été décapitée par la Gestapo.

(plus tard nous saurons que lors de l’arrestation générale à Caluire : Jean Moulin était arrêté.)

Notre parachutage du 16 Mai 1944

Nous attendions un parachutage de matériel pour notre groupe.
Enfin un message personnel de la BBC nous annonce que le 16 Mai nous serions satisfaits : nous entendons dans le brouillage radio :
« Les Oignons de narcisses ne font pleurer personne »
Définies auparavant, la lettre de reconnaissance du balisage de la zone sera ‘P’ (langage Morse avec lampes électriques).
3.5 tonnes en conteneurs : armes et munitions.

Bien des actions aussi diverses que variées

Il eu aussi des punitions matérielles ou corporelles infligées à certains miliciens. Surtout dans la région de Bellevesvres.

La destruction à Chaussin de la presse et du stock de paille réquisitionné par l’armée allemande.

Les expéditions à Aiserey à la distillerie de betteraves pour réquisitionner de l’alcool pour les véhicules (l’essence faisant défaut)

La destruction de miradors sur le camp d’aviation de Longwy sur le Doubs. (je crois)

Pendant la retraite allemande, interception d’un convoi à la Racineuse. Après un fort échange de coups de feu, devant la riposte des Boches et une grosse Mitrailleuse nous nous replions.

A signaler aussi : le 29 et 30 Juillet l’hébergement, la protection, la nourriture par la maison Broux de « Colette » la secrétaire de « Grand-Père ».

L’incursion aux chantier de Jeunesse de Crotenay afin de récupérer de l’habillement : pantalons, blousons, chaussures, qui nous faisaient défaut pour passer l’hiver.

En plus de notre camarade Russe Piotr (Pierre Duchêne), nous récupérons d’autres Russes (Prisonniers des Boches) évadés. Ils furent tous remis au centre de regroupement Russe de Lyon: Alexandre Kourinski, Michel Mametier, Nicolas Kozatov, Ivan Petrouchine.

La LIBERATION : Mission accomplie

A la libération, notre groupe était à la disposition de l’Armée Américaine parce que, rattaché à l’E-M-I-A (Etat Major Inter Allié).

En effet nous devions être disponibles pour servir, renseignements, liaisons à la Première des Armées Alliées qui arrivait dans notre secteur, et ce ; jusqu’aux portes de l’Alsace. Des estafettes motocyclistes, furent dépêchées sur Vesoul, Lure.

En voiture légère plusieurs voyages sur Lyon pour transmettre des plis en Préfecture.

Tout est terminé dans notre secteur !

Le 18 Septembre 1944. La dissolution du Groupe FRANCIS, Camp GAMBETTA, à lieu à Bellevesvre, dernier campement.

Contraints et forcés, car nous voulions faire l’épuration. Ce qui n’a jamais eu lieu.

Notre armement et nos véhicules furent remis au P-C de Louhans ou avait lieu la création du 2em B-C-P.

Nombreux de nos anciens camarades s’engagèrent ainsi pour la durée de la guerre.

Pour LONS LE SAUNIER

Précisions :

‘’ Pourquoi notre groupe n’a pas participé à l’attaque de Lons le 25 Aout 1944 ‘’

A la réunion préliminaire de cette action et en raison de notre armement, il nous fut attribué le secteur Entrée ou Sortie de Montmorot.

A la question de savoir ou serait installé le P-C et quels seraient les moyens de communication. Il fut répondu que celui-ci serait installé en haut de Montaigu à l’église. Et les liaisons par courrier personnel.

Le début de l’attaque fixé à ….. heure. (détail non défini). Et le replis général à 16h quelque soit le résultat.

A ces propos, Francis et moi avons refusé énergiquement de participer à cette action, qui selon nous : était uniquement une affaire de prestige. Car connaissant les Boches, automatiquement, une fois partis, nous allions laisser la population face aux représailles.

« Incendies, fusillades, meurtres » Qui ne manqueront pas d’avoir lieu.

Ce fut malheureusement le cas.

Chemin des Petits Quarts, Avenue de Montciel, Rue des Ecoles, Rue Rolland.

Additif sur le parachutage du 25 Juin

Opération ‘’CADILLAC’’

Voici quelques précisions sur la parachutage du 25 Juin 1944 en plein jour, dans la prairie de Lays sur le Doubs

Organisé par le réseau « Buckmaster » Nous attendions un message de Londres.

Depuis le Mercredi 21 Juin nous écoutions Radio-Londres pour entendre : « Pour Odette et Lucien soyez sous le Cerisier »

(Traduction : ‘‘Odette’’(Yvonne Baseden opératrice radio Agent du S.O.E.) et ‘’Lucien’’(le Baron Gonzague de Saint-Geniès prisonnier évadé, rejoint l’Angleterre. Agent SO.E. Formé à Patriotic School) ; tenez vous prêt un parachutage aura lieu sur le terrain Cerisier entre Charrette, les Hays, Pierre de Bresse

Ce message est arrivé le soir du 24 Juin à 20h.

Puis, « Message de la plus haute importance pour Lucien »

« Le Dromadaire a 2 bosses. 432 tirailleurs sénégalais viendront demain avec X cartouches ».

Puis à 21 h 15 : « 432 tirailleurs sénégalais viendront demain avec chacun 3 cartouches et 36 officiers »

(traduction après décodage : à 8h 30, 432 parachutes largués par 36 bombardiers accompagnés de 70 chasseurs seront lâchés par les 3

Escadres de 12 avions. les vagues de parachutes seront différentes :une vague Bleu, une vague Blanche, une vague Rouge.)

Ce largage dura 16 minutes. La masse de matériel représente 80 Tonnes. Essentiellement des armes et munitions pour les combats de la Libération.

Il fut affecté 6 tonnes de matériel à notre groupe.

Environs 500 hommes : venant des Groupes LUCIEN, DUBOIS, et FTP FRANCIS, étaient mobilisés.

Nous avions coupé toutes liaisons routières et téléphoniques et nous occupions la Poste de Pierre de Bresse.

Le soir du 25 à 21h 15 Radio Londres félicitait tous les Maquisards qui permirent ce parachutage d’envergure le plus important réalisé en plein jour et à cette date pour la Résistance Française.

Pourquoi je suis devenu Résistant.

Par ces quelques lignes je vais essayer de faire comprendre à certains ce pour moi, peut justifier mon adhésion à la Résistance.

Premièrement les divers bouleversements qui ont précédés cette terrible époque. Le 6 Aout 1936 je suis embauché chez Berliet à Vénissieux comme ouvrier. Tout de suite, confronté avec le dûr travail d’usine suivi par la lutte pour les salaires, et autres conditions de vie. Grèves de 1937,1938,1939. Toujours la lutte. Mais la guerre est là. Le régime Hitlérien étant son empire sur l’Europe.

1940. Au travail avec un ami, nous mangeons le midi dans nos gamelles, à l’extérieur de l’atelier. A proximité des voies (SNCF) derrière l’usine. Ou ce forment des trains de wagons de marchandises. Nous ne voulons pas de la victoire allemande.

Aussi, sans consultation ni ordre de quiconque,nous pratiquons ce que par la suite, nous apprenions être du sabotage.

« Nous remplissions les boites de roulements des roues de wagon avec du sable »

J’ai dis sans ordre de qui que ce soit. Car les syndicats et le parti communiste ayant été dissous, certains dirigeants arrêtés, il n’y avait personne dans l’entreprise pour donner des ordres.

Puis ce fut l’appel sous les drapeaux en Juin 40. Suivi des chantiers de Jeunesse, avec le vrai visage de Bons Français.

Renvoyé dans mes foyers début 41, je fus repris chez Berliet.

Que faire seul et ayant envie de faire quelque chose. Comme beaucoup de Français, je n’ai pas entendu l’appel du Général de Gaulle.

Un soir en revenant du travail, dans le tramway n°7, je revois un copain avec qui nous avions fait les conscrits. Parlant de la situation, je lui fait part de ma rage de ne pouvoir rein faire.

En descendant du Tram il me donne rendez-vous chez lui à Cusset le soir même. Le lendemain à la suite d’un autre rendez-vous, il m’emmène chez un voisin d’immeuble ; un certain Marcel Bardon.

Nous avons bien discutés et avoir subit un véritable interrogatoire (famille, amis, …..) Il me demande de revenir quelques jours plus tard, et me présenta à un Mr Laval René. Il me demande si j’accepte de faire parti des Groupes–Francs de Villeurbanne, appartenant au groupe Combat.

Une seule directive, être entièrement libre. Rompre toutes liaisons avec famille et petite amie. En cas d’arrestation ; pas de pression.

C’est ainsi que commence ma vraie vie de Résistant.

Je deviens désormais Louis RIZET

1942

Je pense que c’était pour le 11 Novembre : la milice avait prévue une grande manifestation avec défilé de la place Bellecour à la place des Terreaux ou avait été monté un Podium pour les discours à venir.

Avec Marcel Bardon et quelques jeunes de Villeurbanne nous sommes partis (en ordre très dispersé) pour ne pas être coincés par les flics jusqu’à Bellecour. Après quelques quolibets à l’encontre des miliciens ce formant pour défiler. Nous avons descendu la rue de l’Hôtel de Ville en chantant la Marseillaise et entraînant avec nous une bonne partie de la population. Enlevant les drapeaux qui garnissaient les façades d’immeubles : dont la Banque Marseillaise de Crédit. Drapeaux qui nous faisaient défaut pour arriver place des Terreaux. Il ne nous fallut pas longtemps pour démolir l’estrade et sa décoration puis s’enfuir au travers des rues alentour.

Le soir à Villeurbanne, heureux de se retrouver sans perte et la manifestation Française réussie.

Un jour, (je n’ai plus la date), je fus envoyé en train à Rive-de-Gier prendre livraison de 2 valises contenant des cabris tués que la Résistance du coin nous avait réservé. Charge à nous de les faire cuire, de les découper pour les expédier dans nos colis de prisonniers.

A la descente du train, ayant à la main un journal de la collaboration, « SIGNAL », une jeune personne m’aborda et après les mots de passe, m’emmena à l’Hôtel en face de la gare ou une chambre m’était réservée pour que je puisse, le lendemain matin, reprendre le train pour Lyon. De retour, j’allais avec mes 2 valises dans un restaurant dans une rue transversale à la rue de la République dont l’enseigne était : « Aux 4 Frères Aymont ». J’ai attendu. Immédiatement mes valises prirent le chemin des cuisines. J’attendais sagement dans un coin. Vers 12 ou 13 heures, Je ramenais mes cabris cuits au siège du Service Social de Combat.

Le jour de Noël 1942

J’étais au siège du Service Social pour aider à la confection de colis pour nos camarades arrêtés. Peu avant midi un monsieur bien habillé vint me demander ou j’allais manger. Ma réponse : « Mais ou je demeure pour l’instant ». Il me dit, Venez avec moi, cela me fera une compagnie pour ce jour là. J’acceptais, il m’emmena dans un restaurant à l’angle du Cours Morand et de l’avenue de Saxe à droite en allant vers le Parc de la Tête d’Or. Après le repas payé de ses deniers, au moment de ce séparer, il me remis un billet de 500F pour : « Un peu dédommager les gens qui prennent des risques en vous hébergeant » dit-il. De ce jour je n’ai jamais revu cet homme, ni nom, ni surnom. Qui était-il ? (j’appris bien après la guerre que c’était un des futurs dirigeants de la vraie Résistance Nationale naissante à Lyon).

Le 1er Mars 1943 à Villeurbanne.

Les parents de mon ami Georges Bernard qui habitait rue Pierre Caccard à Villeurbanne, avaient mis à ma disposition une chambre.

Le matin, la sœur de mon ami, partant à son travail me réveillait et je partais sitôt avoir déjeuné. Ce 1er Mars, à peine était-elle partie que, revenant tout essoufflée, elle me dit : « les boches encerclent tout le Quartier  Rue Flachet, Cours Emile Zola, Rue du 4 Aout c’est fermé. Ils perquisitionnent partout dans les immeubles. Dans les couloirs, les caves, Les étages, les jardins ». Je fonce voir mon chef qui habite un immeuble voisin. Il me dit ne t’en fais pas trop, j’ai une cave très encombrée mais non fermée. Quand ils seront là, tu descends, tu entres, tu te cache le mieux possible. S’ils te trouvent, tu dis que tu es entré par hasard dans ce sous-sol. Ils sont venus. Je descendis me cacher. Par le petit regard qui donne sur le trottoir, je vis un boche qui faisait les cent pas  devant l’entrée de l’immeuble pendant que ses copains étaient dans les étages.

Je ne le vois plus ! J’entends les bottes descendre dans les caves. Vite j’entre dans celle de mon Chef. Je vois une table sur un tas de charbon. Je fais mon possible pour m’incérer entre la table et le tas. Personne n’est venu. J’attends un certain temps. Je n’entends rien. Sont –ils partis ? J’essaie de sortir. Impossible. J’étais tellement tricoté dans les pieds et le charbon que je ne pouvais sortir de ma cache. Il fallut l’aide du chef et de mon frère, ne me voyant pas arriver, pour m’extraire. Comment avais-je pu me mettre dans une telle situation. Peut-être la fameuse peur panique. Toujours est-il que j’ai pu vérifier que pour échapper un danger : ‘’ On entrerai dans un trou de rat’’.

Ce n’est que le commencement !