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Bourg en Bresse

La rafle du 10 juillet 1944 à Bourg

Alors que la Milice s’érige pour l’opinion publique comme le dernier rempart de l’ordre, en justifiant ses actions par l’oppression dont elle, et les amis de l’ordre sont victimes de la part du maquis, ce met en place dans le département l’opération Treffenfeld.

Les forces allemandes parcourent le département pour lutter contre les maquis, à lieu à Bourg, le 10 Juillet, la plus grande opération d’oppression ; 80 voitures sont réquisitionnées.

Ce type d’opération de rafle massive sur les arrières, couplée à une action militaire d’envergure, est alors commune sur le front de l’Est contre les partisans. Les hommes du S.D. ne font que reproduire à Bourg un système qui a déjà fait ses preuves.

Le 9 juillet, des camions allemands transportant des soldats arrivent de Lyon et stationnent avenue Alsace-Lorraine.

Le 10, la Sipo S.D. de la Gestapo de Lyon, sous les ordres du sous-lieutenant S.S. Barbie, auquel sont adjoints des hommes de troupes (sans doute les cosaques casernés à Aubry), aidée par la 3e unité de la Milice sous les ordres de Dagostini, opère une rafle de 1 280 hommes de 17 à 45 ans dans les rues de Bourg.

L’opération commence à l’aube. La mairie de Bourg informe les habitants de la ville des mesures prises par les Allemands :
« la population doit rester chez elle sans sortir depuis maintenant jusqu’à la fin des opérations.

1° tous les hommes de 17 à 45 ans doivent se rassembler pour 7h 30 sur les places suivantes :
     – pour les hommes du secteur sud, cours de la Préfecture,
     – pour les hommes du secteur nord, cours de Verdun. Pour les hommes du secteur ouest, place Clémenceau. Devant l’hôpital pour les hommes du secteur Est.
2° Ils devront être porteur de leur carte d’identité, de leur livret de famille et carte de travail,.
3° toute personne de 17 à 45 ans qui ne sera pas à 7h 30 sur les lieux de rassemblement sera fusillé.
4° Des visites à domicile seront faites.
5° La police municipale en uniforme se rassemblera pour 7h 30 au commissariat de police, la gendarmerie se rassemblera à la caserne.
Les autres policiers se rendront sur les lieux de rassemblement, comme le reste de la population »
Les accès au centre ville sont bloqués par les troupes allemandes qui refluent vers le centre. Des patrouilles allemandes sillonnent les rues.

Sous une chaleur de plomb, tout les hommes sont arrêtés et parqués dans trois points : l’hôpital, le cours Verdun et dans la cour de la préfecture et gardés par des russes blancs.

La plan de Barbie est simple. Accompagné du délégué à Lyon du gaultier Sauckel, Krekler, il destine ces hommes, potentiellement maquisards, à être déportés. Pour les services de renseignements de la résistance, la rafle de Bourg marque le départ de l’opération Treffenfeld.

Cours Verdun, un officier allemand, attablé, vérifie les papiers d’identité et réparti les hommes en deux groupes. Un premier comptant une petite dizaine d’hommes, suspects, et un second, comptant 80 à 100 hommes. Les groupes restent en place jusqu’à 15 heures, heure à laquelle débute un terrible orage qui pousse les allemands à laisser partir les raflés non suspects.

Dans la cour de la préfecture, les choses se déroulent d’une manière plus dramatique puisque deux jeunes hommes sont froidement abattus par Barbie.

L’un des raflés, se souvient : « On nous a contrôlés. Certains devaient passer dans la deuxième cour le la préfecture. D’autres étaient libérés. Je venais de donner mes papiers quand j’entendis un coup de feu venu de la seconde cour :un homme venait d’être abattu. Quelques minutes plus tard, un officier allemand braquant son revolver sur la tempe du suivant vociféra : cet homme est un terroriste, il va être abattu ! Le coup de feu claqua et comme l’homme ne tombait pas tout de suite, un deuxième coup de feu retentit et l’homme s’écroula. Après moi venait le fils de l’inspecteur d’académie que je connaissais aussi. Il fut contrôlé. Il vivait à Paris pour passer son diplôme de Normale Sup et venait d’arriver à Bourg en vacance. Il portait au pied de grosses chaussures. L’officier allemand lui dit en désignant ses pieds : « vous maquis !! » Il sera déporté et mourra dans un camp ».  

Les hommes sont alors rassemblés au cinéma, avec pour destination, la gare et l’Est. Les Allemands prévoyant de les déporter, ils leur autorisent à recevoir de leur famille « 1 colis composé de ravitaillement et d’effets chauds » avant de signifier que « tout départ sera précédé d’une visite médicale », sans doute afin de vérifier, suivant les théorèmes fumants nazis, la présence de juifs. Une liste de personnes déportée est publiée. Leurs colis doivent être déposés « avant 16 heures à la gare de Bourg ».

Le 11 juillet, Dagostini demande la liste des hommes indispensables à la bonne marche de la vie administrative et de la ville. Le maire lui fait parvenir une liste de 32 noms d’où les noms des 12 pompiers sont retirés comme « désignés pour le départ ».

Informé des intentions du chef du S.D., Simon chef de la Milice locale, qui ne veut pas voir intervenir les Allemands dans les affaires de police intérieure, alerte le préfet de l’Ain et intervient auprès du général Niehoff qui, le 13 Juillet au soir, arrête l’opération de transit commencée quelques heures auparavant par le regroupement dans la préfecture des raflés et la dispersion de plusieurs d’entre eux dans les casernes Aubry et Brouet.

Le S.D. est dessaisi de l’affaire au profit du Verbindungsstab. À 13 heures, 300 personnes sont libérées, puis, en accord avec la Milice, le Verbindungsstab, “examine tous les cas avec compréhension” dans la salle du Vox.

Le 16 Juillet au soir, seule une trentaine de personnes restent en état de détention. Néanmoins, le S.D. abat plusieurs hommes à Bourg mais aussi dans ses environs. Au total 25 personnes sont assassinées (dont des juifs et des résistants) et 9 sont déportés.